Fort de près de quatorze mille abonnés sur Twitter, le compte @SASpursFr est l’un des fers de lance de la communauté NBA_FR. Tenu par Benjamin et Clément, deux fans passionnés des San Antonio Spurs, le compte connait en moyenne quatre-cent nouveaux abonnements par mois. Un succès dont semble bénéficier l’ensemble des comptes de fans de français.
Pouvez-vous vous présenter brièvement ?
Benj : « Déjà bonjour et merci de me laisser m’exprimer c’est un honneur ! Je m’appelle Benjamin, j’ai 19 ans et je viens de Suisse. Actuellement je suis libre comme l’air en attendant de reprendre mes études en septembre. »
Clément : « Clément, 25 ans, j’habite du côté de Marseille depuis 5 ans, mais je vais revenir dans le Sud-Ouest dans le courant de l’année 2020, pour ma grande délivrance. Dans la vie, je suis Responsable Marketing d’un site de vente en ligne. »
Quel a été votre premier contact avec la NBA ? Depuis quand suivez-vous cette ligue de façon régulière ?
Benj : « Je pense que c’était quand j’étais petit à la télé. J’ai dû voir quelques matchs ou quelques highlights passer sur les chaînes de sport. Je m’intéressais de loin au basket et à la NBA, j’étais surtout fan de foot à l’époque. Je me suis vraiment mis à fond dedans aux alentours de 2015. C’est très tard par rapport à certains, mais comme je vis dans la merveilleuse ère d’internet j’ai pu combler mes lacunes assez vite. Je continue d’apprendre, surtout l’aspect tactique des matchs que je continue d’étudier. C’est passionnant, mais sans l’expérience du jeu en club (j’ai surtout joué en playground) l’apprentissage est un peu plus long. »
Clément : « À mon grand regret, je n’ai jamais eu la chance d’avoir des proches (amis ou familles) qui s’intéressent au basket. J’ai donc découvert la NBA très tard, trop tard… Comme beaucoup de monde je pense, mon tout premier contact a été sur une console avec 2K en 2011. J’étais chez un pote, on a allumé la play de son grand frère et il n’y avait que NBA 2K12 de disponible. J’ai pris les Bulls, car c’était la seule équipe que je connaissais de nom. Dans l’effectif, il y avait un certain Derrick Rose et je m’amusais à tirer à 3pts tout le temps. Il était tellement fort dans le jeu que j’étais persuadé que c’était un excellent shooter à 3pts. Je n’ai pas eu de coup de cœur sur le moment, c’est quatre ans plus tard, en 2015, que j’ai commencé sérieusement à me pencher sur la NBA. »
Comment êtes-vous devenus fans des Spurs ?
Benj : « Quand j’ai commencé à suivre la NBA, je ne connaissais qu’un nom ou presque : Tony Parker. C’est donc tout naturellement que je me suis tourné vers San Antonio. Et à force de découvrir l’histoire et la culture du club je me suis rendu compte que l’équipe me correspondait en tout point ! Une histoire riche et remplie de succès grâce à une gestion intelligente, un jeu collectif où les performances individuelles sont toujours laissées au vestiaire, le meilleur coach de tous les temps… Au final il y a beaucoup de similitudes avec Manchester United dont je suis fans depuis bientôt 15 ans. Ça vient peut-être de là. Mais je pense que l’amour vers une franchise ne se décide pas, ça vient ou ça ne vient pas. Et je suis tombé amoureux de cette équipe qui commence à me faire du mal (référence aux résultats mitigés de la franchise cette année). »
Clément : « Printemps 2015, cette fois-ci en coloc avec un pote, il avait ramené sa XBOX et on a lancé 2K15. On se retrouvait pratiquement tous les soirs pour y jouer. C’est à partir de là, que j’ai commencé à réellement me pencher dessus. Ce système de franchises, de draf… Ça m’intriguait et j’ai voulu tout savoir, tout connaître ! J’ai parcouru les pages Wikipédia, les forums, les réseaux sociaux, les bouquins, les vidéos YouTube.
J’ai vraiment commencé à m’intéresser aux Spurs en lisant des articles sur Popovich (coach de la franchise depuis 1996). Etonnamment, aucun joueur ne m’avait attiré jusque-là, simplement ce coach. Le personnage me fascinait : un vieux grincheux froid et sévère à première vue, qui finalement cache une personne incroyablement humaine et drôle en dehors des terrains, paternaliste dans tous les sens du terme. En me penchant sur l’homme puis le coach j’ai tout de suite accroché, ses valeurs et le jeu qu’il propose m’ont tout de suite correspondu : défense, collectif et peu d’individualité.
En me penchant sur Popovich, je me suis forcément penché sur toute la franchise. Absolument tout ce qu’inspire la franchise m’a attiré : la modestie, l’excellence, la régularité, la fidélité, l’efficacité, le collectif et la discrétion. Des valeurs que je partage dans la vie de tous les jours. Ensuite l’histoire est trop belle pour ne pas tomber amoureux : Tim Duncan qui devait devenir nageur professionnel et qui devient finalement le meilleur joueur all-time à son poste, les deux titres pour David Robinson avant sa retraite, la création du Big 3 (Tim Duncan, Manu Ginobili, Tony Parker) avec deux non-américains, la domination des années 2000, le titre de 2014 après la désillusion de 2013. Incroyable ! »
Pourquoi avoir décidé de créer (reprendre dans votre cas) un compte Twitter dédié à votre franchise de cœur ?
Benj : « Dans mon cas, avant de reprendre ce compte, j’étais CM d’un autre compte des Spurs, anciennement baptisé @SpursSAFR. qui suite à mon départ est devenu un compte dédié aux Austin Spurs, notre équipe de G-League (ligue de développement de la NBA). L’histoire c’est qu’en début d’année 2017, il n’y avait qu’un seul compte Spurs France, c’était d’ailleurs celui que l’on a repris avec Clément. Aux alentours de février, un autre compte qui est apparu : @SpursSAFR. Quand j’ai vu que le compte se lançait et qu’il avait un peu de peine à se démarrer, je lui ai proposé de lui filer un coup de main pour le rendre plus actif. A l’époque, je trainais beaucoup sur Twitter. Au fil des mois, le créateur du compte était de moins en moins présent (études, examens, etc.), et moi de plus en plus jusqu’au point où il m’a plus ou moins laissé le compte. Il m’envoyait un message tous les six mois pour me féliciter. Depuis, je n’ai plus trop de contact avec lui. Aujourd’hui, je ne sais toujours pas si je ne lui ai pas un peu volé son compte… Mais bon, il n’a pas l’air de se plaindre ! »
Clément : « Cette question concerne surtout Benj qui, lui pour le coup, avait créé son propre compte « de franchise » avant de rejoindre celui de la Spurs Nation France. Pour moi c’est un peu différent, le compte est avant tout lié à l’association Spurs Nation France et Vincent (le créateur original du compte) ne trouvait plus le temps ni l’envie de l’animer. Il a donc logiquement cherché une personne membre de l’association et active sur Twitter : moi. N’ayant pas forcément le temps ni l’expérience de gérer un compte de cette ampleur, j’ai contacté Benj pour m’aider. Pour le convaincre de le lâcher son compte précédent, il a fallu argumenter pendant des jours, mais il a finalement accepté. Depuis que je co-tiens le compte et je dois avouer que c’est particulièrement jouissif de pouvoir exprimer sa passion à plus de 13500 personnes. »
Pouvez-vous nous expliquer le fonctionnement de votre compte ? Quel genre d’investissement cela demande au quotidien ?
Benj : « C’est assez simple. Quand Vince, l’ancien admin du compte, est parti, il a laissé les clés à Clément, mais il ne se sentait pas de gérer ça tout seul. Il m’a donc appelé et après d’intenses négociations, j’ai accepté de le rejoindre. En gros, moi je fais exactement la même chose qu’avant : je traite l’actualité de l’équipe, je commente les matchs, j’interagis avec les gens (je fais des blagues nulles aussi) … Je m’occupe de tout ce qui touche aux Spurs, et Clément de tout ce qui touche à la Spurs Nation France, l’association de fans dont le compte Twitter est le « porte-étendard » ».
Clément : « Comme dit plus haut, notre compte diffère légèrement des autres comptes de fans. Nous sommes avant tout une association et en plus de traiter l’actualité des Spurs, ce compte est une surtout une vitrine de la Spurs Nation France, de ses activités et des évènements qu’elle organise. Pour la gestion du compte, du coup c’est assez simple. Tout ce qui touche l’actualité des Spurs, les débats, les lives de match, c’est Benjamin qui gère. Tout ce qui touche à l’association, au site internet et aux résumés de matchs, c’est plutôt moi. En plus de la gestion du compte, nous écrivons régulièrement des articles pour notre site internet et nous enregistrons chaque mois un. Ça demande de l’investissement forcément, mais c’est un vrai kiff. »
Benj : « Depuis qu’on a lancé le site et le podcast, c’est parfois un peu plus chargé, mais personnellement je prends tellement de plaisir à faire que je ne considère même pas ça pour de l’investissement. Factuellement, je passe plusieurs fois par jours sur Twitter pour checker les notifications, répondre aux gens, tweeter les informations, etc. Au final c’est comme un passe-temps. La vraie galère c’est quand je dois décider si je mets mon réveil à 2h00 pour commenter le match en direct ou si je mate le replay le lendemain. Cela dépend surtout de ma journée du lendemain, parce que oui j’ai aussi une vie à côté… Par exemple, l’année dernière j’étais étudiant, et je n’ai pu commenter qu’à peine la moitié des matchs de la saison. En ayant plus de temps cette année, je tourne aux alentours de 75%. Au final, je regrette rarement de m’être levé et c’est aussi un plaisir de m’énerver devant mon écran et le retranscrire à l’écrit. »
Etes-vous déjà allés San Antonio pour assister à un match des Spurs ?
Benj : « Pas encore, non. Ça va forcément arriver un jour mais je n’ai aucune idée de quand exactement. »
Clément : « À l’heure où je réponds à ces questions, je décolle dans 20 jours direction San Antonio. Ce sera mon premier voyage aux États-Unis, et naturellement mes premiers matchs NBA ! C’est par le biais de notre association Spurs Nation France que nous organisons des voyages chaque année à San Antonio en partenariat avec Gate One Voyages. C’est un rêve qui va bientôt devenir réalité ! On y reste une semaine pour voir les matchs face à Dallas, Denver et Minnesota. »
Sentez-vous un engouement grandissant autour de la NBA en France ?
Benj : « Tout à fait. Sans parler du match NBA à Paris qui n’a, selon moi, aucune valeur (contrairement aux billets), il suffit de voir le nombre de personnes qui chaque jour nous rejoignent sur Twitter. Il y a beaucoup de nouveaux fans qui apprennent sur le tas. Je pense que c’est important, en tant compte « influent », d’aider les nouveaux à comprendre et à apprécier le basket et la NBA. Même sans parler de Twitter, rien que dans ma petite ville d’à peine 10 000 habitants, je vois de plus en plus de jeunes sur les playgrounds. C’est une victoire pour le basket ! »
Clément : « Je n’ai plus les mots exacts mais Trashtalk l’avait très bien expliqué dans une vidéo. La NBA (contrairement aux autres sports, comme le foot en France) a décidé d’offrir beaucoup de liberté concernant les diffusions de vidéos sur les réseaux. Le pari est réussi, car l’engouement a vraiment explosé depuis quelques années en partie grâce à ça. Les médias comme TrashTalk et First Team ont su sauter sur l’occasion et ont couvert, chacun à leur manière, toute l’actualité NBA en vulgarisant et en rendant très accessible beaucoup de contenu. Ça a beaucoup aidé, surtout via Youtube et les réseaux sociaux. Lorsqu’on voit qu’on arrive à plus de 400 abonnés chaque mois en moyenne, on se dit que la NBA commence réellement à exploser en France, et surtout en France d’ailleurs. »
Avec les autres comptes NBA_FR avez-vous l’impression de participer, à votre échelle, à cet engouement ? Dans quelle mesure ?
Benj : « On est peut-être une porte d’entrée facile à ceux qui découvrent la NBA, grâce à notre ton et les informations/discussions que l’on partage, mais ça reste minime. C’est la NBA elle-même qui crée son engouement, notamment avec des joueurs comme Steph Curry et LeBron James. Ce sont de super ambassadeurs pour la NBA, qui font très régulièrement parler du basket dans les médias. C’est un peu similaire à l’explosion de la NBA dans les années 90′ avec Jordan & Co. Nous on en profite plus qu’on y contribue. »
Clément : « Je ne pense pas qu’on soit la première force d’acquisition des nouveaux fans, mais plutôt une contribution dans le processus. Les nouveaux fans débarquent souvent sur les gros médias très présents sur les réseaux sociaux et découvrent ensuite que des comptes FR sont « reliés » à chaque franchise NBA. Je pense que ce qui attire ces nouveaux fans c’est d’avoir des infos et un contenu lié à une franchise bien précise, car de notre côté on renvoie un peu une image de « spécialiste » qui est à double tranchant. Les personnes qui se cachent derrière les comptes FR sont vraiment des passionnés qui proposent énormément de contenu lié à leur franchise et quand tu transmets autant de passion tu ne peux qu’avoir des fans qui s’accrochent en retour. Pour résumé, pour moi, nous ne sommes pas à l’origine de cet engouement mais nous participons au fait qu’il ne soit pas éphémère. »
Par le biais de Twitter, avez-vous l’impression de vivre à distance votre rêve américain?
Benj : « Non pas du tout ! On est juste des fans qui partageons notre passion, on est à des années-lumière d’un « rêve américain ». Cependant, on (les comptes de franchises) a la chance de commencer à être reconnus par les médias plus « traditionnels », et on essaie toujours de pousser un peu plus loin nos ambitions. beIN Sports, par exemple, nous a récemment invité dans leurs locaux. Ça paraît minime, mais c’est un gros pas en avant pour nous. On s’éclate à faire ce qu’on fait et si ça peut nous offrir des opportunités dans le futur, c’est du bonus ! »
Clément : « Il faut voir où ça nous mène, mais c’est clair que ça y contribue, surtout quand on voit comment les comptes FR de Charlotte et de Milwaukee ont été impliqués dans le NBA Paris Game en Janvier. C’est fou, ça dépasse complètement nos attentes. J’ai encore l’image d’Hugo de BucksFR interviewé spécialement par le compte officiel des Milwaukee Bucks. C’était hallucinant. Je pense aussi à Bein Sport qui a invité un membre de chaque compte FR pour visiter les locaux et profiter des matchs du Martin Luther King Day. Personne n’avait imaginé ça non plus. À notre niveau, difficile de s’amuser avec le service communication des Spurs, qui est égal aux performances marketing de la franchise ces dernières années : réservé, ennuyeux et fermé. Heureusement, via l’association et nos précédents voyages, nous avons réussi à construire une relation avec des membres du staff de sorte à pouvoir offrir aux fans qui voyagent avec nous des expériences uniques. »
Propos recueillis par Vincent Poulain.
